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La saisie-revendication et la saisie-appréhension : comment récupérer vos biens meubles



Vous êtes propriétaire d'un bien mobilier que quelqu'un refuse de vous restituer ? Créancier avec un droit de gage ou bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété ? Le droit français met à votre disposition deux outils puissants : la saisie-revendication et la saisie-appréhension.

Ces procédures, souvent méconnues, permettent de récupérer un bien meuble corporel. Leur maîtrise fait toute la différence entre une situation bloquée et une résolution efficace.

Définitions et cadre juridique

Deux procédures distinctes mais complémentaires

La saisie-revendication est une mesure conservatoire qui rend indisponible un bien meuble corporel en attendant sa remise au créancier. Elle est définie à l'article L. 222-2 du Code des procédures civiles d'exécution (CPCE) : "Toute personne apparemment fondée à requérir la délivrance ou la restitution d'un bien meuble corporel peut, en attendant sa remise, le rendre indisponible au moyen d'une saisie-revendication."

La saisie-appréhension, quant à elle, constitue une mesure d'exécution forcée permettant de faire effectivement appréhender le bien par un commissaire de justice. L'article L. 222-1 du CPCE précise : "Le commissaire de justice chargé de l'exécution fait appréhender les meubles que le débiteur est tenu de livrer ou de restituer au créancier en vertu d'un titre exécutoire, sauf si le débiteur s'offre à en effectuer le transport à ses frais."

La saisie-revendication peut être le prélude à une saisie-appréhension. Dans un premier temps, on rend le bien indisponible (saisie-revendication), puis on procède à son enlèvement effectif (saisie-appréhension).

Quels biens peuvent être récupérés ?

Uniquement des meubles corporels

Ces procédures ne concernent que les biens meubles corporels : véhicules, machines, mobilier, équipements, etc. Comme le précise l'article R. 222-17 du CPCE, elles ne s'appliquent ni aux biens immeubles (terrains, constructions), ni aux biens meubles incorporels (créances, droits d'auteur, etc.).

Pour les biens fongibles (interchangeables), la situation est plus complexe. Si les biens n'ont pas été individualisés et sont confondus avec d'autres de même nature, la revendication peut être compromise. Toutefois, le Code de commerce prévoit des aménagements en cas de procédure collective (art. L. 624-16).

Comme l'a précisé la Cour d'appel de Paris, la saisie-revendication ne peut porter que sur les originaux de documents, et non sur leurs copies (CA Paris, 21 déc. 2006).

Quelques exemples concrets

La jurisprudence a admis la saisie-revendication pour divers biens :

  • Véhicules et matériel roulant
  • Équipements professionnels
  • Marchandises vendues avec réserve de propriété
  • Souvenirs de famille (Cass. 2e civ., 29 mars 1995)
  • Même des aéronefs (CA Versailles, 4 mai 1994)

Qui peut recourir à ces procédures ?

Les titulaires de droits sur le bien

Peuvent utiliser ces procédures :

  • Le propriétaire du bien qui souhaite sa restitution
  • L'acheteur qui n'a pas obtenu livraison du bien payé
  • Le vendeur impayé bénéficiant d'une clause de réserve de propriété
  • Le créancier gagiste souhaitant exercer son droit de gage
  • Le bailleur (leasing, crédit-bail) réclamant la restitution du bien loué
  • Le prêteur (commodant) exigeant le retour du bien prêté
  • Le déposant réclamant son bien au dépositaire

À noter que depuis l'ordonnance du 23 mars 2006, l'article 2367 du Code civil définit la clause de réserve de propriété comme "suspendant l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie".

La saisie-revendication : procédure et mise en œuvre

L'autorisation judiciaire préalable

En principe, une autorisation du juge est nécessaire. La requête est présentée au juge de l'exécution du lieu où demeure le débiteur (art. R. 222-18 CPCE).

Exceptions où l'autorisation n'est pas requise (art. L. 511-2 CPCE) :

  • Lorsque le créancier dispose d'un titre exécutoire
  • Lorsqu'il bénéficie d'une décision de justice non encore exécutoire

L'ordonnance d'autorisation du juge est "opposable à tout détenteur du bien désigné" (art. R. 222-17 CPCE). Elle devient caduque si la mesure n'est pas exécutée dans les trois mois (art. R. 511-6 CPCE).

L'exécution par le commissaire de justice

Le commissaire de justice procède à la saisie-revendication en dressant un acte qui contient, à peine de nullité (art. R. 222-21 CPCE) :

  • La mention de l'autorisation ou du titre
  • La désignation détaillée du bien
  • La déclaration du détenteur sur une éventuelle saisie antérieure
  • L'information que le bien est placé sous la garde du détenteur
  • L'indication des voies de recours

Une copie est remise au détenteur, et si la saisie est pratiquée entre les mains d'un tiers, l'acte est également signifié au débiteur dans un délai de huit jours.

Les effets de la saisie-revendication

La saisie-revendication rend le bien indisponible : le détenteur ne peut ni l'aliéner, ni le déplacer (sauf motif légitime et avec information préalable).

Cependant, cette mesure ne permet pas l'enlèvement du bien. Pour cela, il faudra convertir la saisie-revendication en saisie-appréhension.

Le juge peut à tout moment autoriser la remise du bien à un séquestre (art. R. 222-23 CPCE).

La saisie-appréhension : procédure et mise en œuvre

Sur la base d'un titre exécutoire

Quand le créancier dispose d'un titre exécutoire, la procédure varie selon que le bien se trouve entre les mains :

  1. Du débiteur :

    • Signification d'un commandement de délivrer ou restituer
    • Délai de huit jours laissé au débiteur pour s'exécuter
    • Appréhension immédiate possible si le débiteur est présent et refuse d'effectuer le transport
  2. D'un tiers :

    • Signification d'une sommation au tiers
    • Dénonciation au débiteur
    • En cas de refus, saisine du juge de l'exécution
    • Appréhension sur présentation de la décision du juge

La procédure d'injonction

En l'absence de titre exécutoire, le créancier peut demander une injonction de délivrer ou de restituer au juge de l'exécution (art. R. 222-11 CPCE).

Le juge rend une ordonnance qui est signifiée au débiteur avec sommation :

  • Soit de transporter le bien dans les 15 jours
  • Soit de former opposition

Si le débiteur forme opposition, le créancier doit saisir le juge du fond dans les deux mois.

En l'absence d'opposition, l'ordonnance devient exécutoire et produit les effets d'un jugement contradictoire en dernier ressort. Elle peut alors servir de base à une saisie-appréhension.

Cas particuliers et obstacles potentiels

La règle "en fait de meubles, possession vaut titre"

L'article 2276 du Code civil peut faire obstacle à la revendication si le détenteur est de bonne foi. Exceptions :

  • Si le détenteur est de mauvaise foi
  • En cas de perte ou de vol (revendication possible dans les trois ans)

En cas de procédure collective

La mise en œuvre est plus complexe :

  • L'article L. 622-21 du Code de commerce interdit les voies d'exécution après le jugement d'ouverture
  • La saisie-revendication pratiquée pendant la période suspecte peut être frappée de nullité
  • Le créancier doit suivre la procédure spéciale de revendication prévue aux articles L. 624-9 et suivants du Code de commerce

En cas de surendettement

La recevabilité d'un dossier de surendettement entraîne normalement la suspension des procédures d'exécution (art. L. 722-2 du Code de la consommation).

Cependant, la saisie-revendication, qui concerne un droit réel et non une créance de somme d'argent, pourrait échapper à cette suspension.

L'importance d'une stratégie juridique adaptée

Pour un créancier, choisir entre saisie-revendication et saisie-appréhension (ou les combiner) nécessite une analyse précise de la situation :

  • Disposez-vous déjà d'un titre exécutoire ?
  • Le bien risque-t-il de disparaître rapidement ?
  • Le détenteur est-il le débiteur ou un tiers ?
  • Existe-t-il des obstacles prévisibles (bonne foi du détenteur, procédure collective...) ?

Un conseil juridique préventif permet souvent d'éviter des impasses procédurales ou la caducité des mesures engagées.

Par exemple, en cas de conflit entre créanciers revendiquant des droits sur le même bien, la stratégie procédurale peut s'avérer déterminante pour établir une priorité.

Nos avocats analysent votre situation et déterminent la stratégie optimale pour récupérer vos biens. N'attendez pas que votre droit de revendication soit compromis : contactez notre cabinet pour une consultation sur vos options juridiques.

Sources

Textes législatifs

  • Code des procédures civiles d'exécution, articles L. 222-1 et suivants, R. 222-17 à R. 222-25
  • Code civil, articles 2276, 2367 et suivants
  • Code de commerce, articles L. 622-21, L. 624-9 et suivants

Jurisprudence

  • Cass. 2e civ., 29 mars 1995, n° 93-18.769
  • CA Paris, 21 déc. 2006, RG n° 06/09717
  • Cass. 2e civ., 10 févr. 2011, n° 10-13.894
  • CA Versailles, 4 mai 1994

Doctrine

  • R. PERROT et P. THÉRY, "Procédures civiles d'exécution", 3e éd., 2013, Dalloz
  • L. AYNÈS et P. CROCQ, "Droit des sûretés", 10e éd., 2016, LGDJ
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