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Saisie-vente : comprendre cette procédure d'exécution forcée



Quand votre débiteur ne paie pas malgré un jugement en votre faveur, l'huissier de justice peut mettre en œuvre une saisie-vente. Cette procédure, qui permet de saisir puis vendre les biens meubles corporels du débiteur, reste une arme efficace pour recouvrer votre créance.

Qu'est-ce que la saisie-vente ?

La saisie-vente est une procédure d'exécution forcée permettant à un créancier de faire saisir et vendre les biens meubles corporels de son débiteur pour se faire payer sur le prix de la vente. Elle est réglementée par les articles L. 221-1 à L. 221-6 et R. 221-1 à R. 221-61 du Code des procédures civiles d'exécution.

Comme le rappelle l'article 2285 du Code civil, "quiconque s'est obligé personnellement est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir". C'est l'application concrète de ce principe qui autorise la saisie des biens du débiteur récalcitrant.

Conditions préalables à la saisie-vente

Pour engager une saisie-vente, plusieurs conditions doivent être réunies :

Un titre exécutoire

Le créancier doit être muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. L'article L. 111-3 du Code des procédures civiles d'exécution énumère limitativement ces titres :

  • Décisions judiciaires
  • Actes notariés revêtus de la formule exécutoire
  • Extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties
  • Titres délivrés par huissier en cas de non-paiement d'un chèque
  • Etc.

Sans titre exécutoire, pas de saisie-vente possible. La seule mise en demeure ou lettre de recouvrement ne suffit pas.

Un commandement de payer préalable

Avant toute saisie-vente, l'huissier doit signifier au débiteur un commandement de payer qui contient, à peine de nullité :

  • La référence au titre exécutoire
  • Le décompte des sommes réclamées (principal, frais, intérêts)
  • Le taux des intérêts
  • La mise en demeure de payer dans un délai de 8 jours

Ce n'est qu'après ce délai de 8 jours que les opérations de saisie peuvent commencer, laissant ainsi une dernière chance au débiteur de s'exécuter volontairement.

Déroulement de la saisie-vente

La saisie des biens

Lors de la saisie, l'huissier de justice se rend au domicile du débiteur ou dans tout lieu où se trouvent ses biens. Il dresse un procès-verbal contenant :

  • La désignation détaillée des biens saisis
  • La mention du caractère indisponible des biens
  • L'information que les biens sont placés sous la garde du débiteur
  • L'indication qu'il dispose d'un délai d'un mois pour procéder à une vente amiable

Le procès-verbal est immédiatement remis au débiteur s'il est présent, ou lui est signifié dans les plus brefs délais.

L'inventaire peut inclure tous types de biens meubles corporels : mobilier, véhicules, équipements... Attention toutefois aux biens insaisissables énumérés à l'article L. 112-2 du Code des procédures civiles d'exécution : literie, vêtements, équipement nécessaire aux personnes handicapées, etc.

Particularité : la saisie chez un tiers

La saisie-vente peut également être pratiquée entre les mains d'un tiers détenant des biens appartenant au débiteur. Dans ce cas, l'huissier demande au tiers de déclarer les biens qu'il détient pour le compte du débiteur. Cette déclaration est importante car un tiers qui refuse de répondre ou fait une déclaration inexacte peut être condamné au paiement des causes de la saisie.

Si la saisie a lieu dans les locaux d'habitation d'un tiers, l'huissier doit obtenir l'autorisation préalable du juge de l'exécution.

La vente des biens saisis

La vente des biens saisis peut se faire selon deux modalités :

1. La vente amiable

Le débiteur dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification de l'acte de saisie pour procéder lui-même à la vente amiable des biens. Les propositions d'acquisition doivent être communiquées à l'huissier, qui les transmet au créancier.

Ce dernier dispose alors de 15 jours pour les accepter ou les refuser. Le silence vaut acceptation. En cas d'accord, le prix de vente est consigné entre les mains de l'huissier.

Cette option présente l'avantage de permettre souvent l'obtention d'un meilleur prix que lors d'une vente forcée.

2. La vente forcée

À défaut de vente amiable, les biens sont vendus aux enchères publiques. La publicité de la vente est assurée par affiches et, éventuellement, par voie de presse. La vente est effectuée par un officier ministériel (commissaire de justice depuis le 1er juillet 2022, anciennement huissier de justice ou commissaire-priseur judiciaire).

L'adjudication est faite au plus offrant, après trois criées, et le prix doit être payé comptant. À défaut, l'objet est remis en vente immédiatement.

Incidents de la saisie-vente

La procédure de saisie-vente peut être émaillée d'incidents :

L'opposition des créanciers

D'autres créanciers peuvent se joindre à la procédure par voie d'opposition. Ils doivent également être munis d'un titre exécutoire et avoir signifié un commandement de payer.

L'opposition doit être formée avant l'établissement du procès-verbal de vérification des biens saisis. Elle est signifiée au créancier premier saisissant et au débiteur. Le créancier opposant peut également demander un inventaire complémentaire pour étendre la saisie à d'autres biens.

C'est le créancier premier saisissant qui poursuit seul la vente, mais en cas de négligence de sa part, tout créancier opposant peut le sommer de procéder à la vente dans un délai de 8 jours. À défaut, il est subrogé dans ses droits.

Contestations relatives à la validité de la saisie

Le débiteur peut contester la validité de la saisie pour vice de forme ou de fond. Ces contestations doivent être portées devant le juge de l'exécution du lieu de la saisie, mais elles ne suspendent pas les opérations de saisie, sauf décision contraire du juge.

La demande en nullité n'est recevable que jusqu'à la vente des biens saisis. Si la nullité est prononcée après la vente mais avant la distribution du prix, le débiteur peut demander la restitution du produit de la vente.

Contestations relatives aux biens saisis

Action en distraction

Lorsqu'un tiers soutient qu'ont été compris dans la saisie des biens lui appartenant, il peut exercer une action en distraction devant le juge de l'exécution. Cette action n'est recevable que jusqu'à la vente des biens et doit préciser les éléments sur lesquels se fonde le droit de propriété invoqué.

"En fait de meubles, la possession vaut titre" (article 2276 du Code civil). Le tiers devra donc apporter la preuve de sa propriété par tous moyens, notamment des factures d'achat.

Si l'action est fondée, les biens revendiqués sont distraits de la saisie. Si la demande intervient après la vente mais avant la distribution des deniers, le tiers peut demander que l'on distraie du prix de vente la valeur des biens qui lui appartenaient.

Contestation sur la saisissabilité des biens

Le débiteur peut contester la saisissabilité de certains biens compris dans la saisie. Cette contestation doit être introduite dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'acte de saisie. Elle ne fait pas obstacle à la saisie mais en suspend la procédure pour les biens concernés.

Cas particuliers

Le véhicule terrestre à moteur

Les véhicules font l'objet de règles spécifiques. L'huissier peut, lors de la saisie-vente, immobiliser le véhicule (généralement à l'aide d'un "sabot de Denver") en le mentionnant dans le procès-verbal de saisie.

Toutefois, si le véhicule est un instrument de travail nécessaire à l'exercice personnel de l'activité professionnelle du débiteur, il peut être insaisissable. La jurisprudence apprécie strictement cette condition : un médecin ne peut ainsi se prévaloir de l'insaisissabilité pour un véhicule lui permettant seulement de se rendre à son cabinet (Cass. 2e civ., 15 déc. 2005, n° 04-14.600).

L'EIRL (Entrepreneur Individuel à Responsabilité Limitée)

Le statut de l'EIRL permet à l'entrepreneur de protéger son patrimoine personnel des créanciers professionnels en créant un patrimoine affecté. Les créanciers professionnels ne peuvent alors saisir que les biens affectés à l'activité professionnelle, tandis que les créanciers personnels n'ont pour gage que le patrimoine non affecté.

La situation de surendettement ou de procédure collective

En cas de procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire) ou de surendettement, les procédures de saisie individuelles sont suspendues ou interdites. Une saisie-vente en cours devra être levée si, à la date du jugement d'ouverture, elle n'a pas, par la vente, produit ses effets (Com. 21 sept. 2010, n° 09-15.117).

Rôle déterminant de l'huissier de justice

L'huissier de justice joue un rôle central dans la procédure de saisie-vente. Il :

  • Vérifie la conformité du titre exécutoire
  • Signifie le commandement de payer
  • Dresse l'inventaire des biens
  • Vérifie que les biens ne sont pas insaisissables
  • Informe le débiteur de ses droits et obligations
  • Organise la vente des biens

Depuis le 1er juillet 2022, la profession d'huissier de justice a fusionné avec celle de commissaire-priseur judiciaire pour former la nouvelle profession de commissaire de justice.

Protéger vos droits dans le cadre d'une saisie-vente

La saisie-vente offre une garantie réelle au créancier pour le recouvrement de sa créance. Cependant, cette procédure est encadrée par des règles strictes qui protègent les droits du débiteur et des tiers.

Qu'il s'agisse de contester une saisie-vente, de la mettre en œuvre ou de faire valoir vos droits en tant que tiers, l'intervention d'un avocat spécialisé dans le droit de l'exécution s'avère souvent déterminante. Notre cabinet vous accompagne dans ces démarches complexes pour garantir le respect de vos droits et l'efficacité des procédures engagées. N'hésitez pas à nous contacter pour une analyse personnalisée de votre situation.

Sources

  • Code des procédures civiles d'exécution, articles L. 221-1 à L. 221-6 et R. 221-1 à R. 221-61
  • Code civil, articles 2276, 2277 et 2285
  • Cass. 2e civ., 15 déc. 2005, n° 04-14.600
  • Cass. com., 21 sept. 2010, n° 09-15.117
  • Cass. 2e civ., 20 nov. 2003, n° 01-15.192
  • Ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice
  • Ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés
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