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La saisie-attribution : arme redoutable pour recouvrer vos créances



Vous êtes créancier impayé malgré un jugement favorable? La saisie-attribution représente l'une des procédures d'exécution les plus efficaces du droit français. Cette technique juridique permet de récupérer directement les sommes détenues pour votre débiteur par un tiers (banque, employeur, etc.). Son efficacité repose sur un mécanisme radical : dès sa signification, la créance est immédiatement attribuée au créancier saisissant.

Un mécanisme aux conditions strictes

La saisie-attribution obéit à des règles précises définies par le Code des procédures civiles d'exécution.

Un titre exécutoire indispensable

Sans titre exécutoire, pas de saisie-attribution possible. L'article L. 111-3 du Code des procédures civiles d'exécution liste limitativement ces titres:

  • Décisions judiciaires exécutoires
  • Actes notariés revêtus de la formule exécutoire
  • Extraits de procès-verbaux de conciliation
  • Transactions et accords contresignés par avocats revêtus de la formule exécutoire
  • Titres délivrés par un huissier pour les chèques impayés

La créance que vous souhaitez recouvrer doit être certaine, liquide et exigible, comme le stipule l'article L. 211-1 du Code des procédures civiles d'exécution. Ce triptyque juridique implique:

  • L'existence indiscutable de la dette (certaine)
  • Un montant précis en argent (liquide)
  • Une dette arrivée à échéance (exigible)

Une créance saisissable

La procédure cible une créance de somme d'argent appartenant au débiteur entre les mains d'un tiers. Celle-ci doit:

  • Porter sur une somme d'argent
  • Être disponible au moment de la saisie
  • Ne pas être frappée d'insaisissabilité légale

Les situations complexes ne manquent pas. Une créance déjà cédée via bordereau Dailly échappe à la saisie (Cass. com., 13 févr. 1996). De même, une créance faisant l'objet d'une compensation avec une dette connexe s'avère insaisissable si la compensation est intervenue avant la saisie (Cass. 2e civ., 16 déc. 2004, n° 03-13.117).

Les acteurs du triangle juridique

Trois personnes jouent un rôle dans cette procédure:

Le créancier saisissant

Sa capacité juridique à agir s'avère primordiale. L'article L. 111-9 du Code classe la saisie-attribution comme un acte d'administration, accessible aux personnes disposant de cette capacité.

Un mineur émancipé peut agir seul. En revanche, pour un majeur sous protection, les règles varient:

  • Sauvegarde de justice: capacité maintenue
  • Curatelle: capacité pour l'acte de saisie mais pas pour recevoir le paiement
  • Tutelle: intervention du tuteur nécessaire

Les débiteurs en procédure collective? Leurs capacités dépendent du régime applicable: sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.

Le débiteur saisi

Simple "cible" de la procédure, son consentement reste superflu. Pourtant, ses droits sont protégés via l'obligation de dénonciation de la saisie.

Le tiers saisi

Élément central du dispositif, il détient la créance saisie. Son rôle ne se limite pas à subir passivement la procédure. Il doit:

  • Recevoir l'acte de saisie
  • Déclarer l'étendue de ses obligations envers le débiteur
  • Suspendre tout paiement au débiteur
  • Verser les sommes au créancier saisissant

L'article R. 211-5 du Code des procédures civiles d'exécution sanctionne lourdement le tiers qui ne remplit pas ses obligations: il risque d'être condamné personnellement à payer les causes de la saisie!

La mise en œuvre: rigueur procédurale exigée

L'acte de saisie: formalisme impératif

L'acte de saisie, rédigé et signifié par un commissaire de justice (ex-huissier), doit contenir sous peine de nullité:

  • L'identification précise du débiteur
  • L'énonciation du titre exécutoire
  • Le décompte détaillé des sommes réclamées
  • L'indication que le tiers est personnellement tenu
  • Diverses mentions légales informatives

La Cour de cassation reste intransigeante sur le décompte des sommes: son absence entraîne la nullité de l'acte (Cass. 2e civ., 19 sept. 2002, n° 00-22.086).

Un clerc assermenté ne peut valablement signifier cet acte - seul le commissaire de justice est compétent (Cass. 2e civ., 28 juin 2006, n° 04-17.514).

La dénonciation au débiteur: délai fatal

À peine de caducité, la saisie doit être dénoncée au débiteur dans les huit jours suivant sa signification au tiers. L'acte de dénonciation doit contenir:

  • Une copie du procès-verbal de saisie
  • L'indication du délai de contestation d'un mois
  • La désignation du juge compétent

Une erreur sur la date d'expiration du délai entraîne la nullité de l'acte (Cass. 2e civ., 2 déc. 2004, n° 02-20.622).

À la différence de l'acte de saisie, la dénonciation peut être effectuée par un clerc assermenté (Cass. 2e civ., 12 oct. 2006, n° 05-10.850).

La déclaration du tiers saisi: transparence exigée

Le tiers saisi doit "sur-le-champ" fournir à l'huissier:

  • L'étendue de ses obligations envers le débiteur
  • Les modalités affectant ces obligations
  • Les éventuelles cessions ou saisies antérieures

Sans motif légitime, le défaut de déclaration entraîne sa condamnation au paiement des causes de la saisie (article R. 211-5 du Code).

Des effets juridiques puissants

L'attribution immédiate: une spécificité radicale

L'originalité de la saisie-attribution réside dans son effet attributif immédiat. L'article L. 211-2 du Code des procédures civiles d'exécution dispose:

"L'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires."

Cette attribution rend inopérantes les saisies postérieures, même provenant de créanciers privilégiés. Seules les saisies pratiquées le même jour concourent entre elles.

L'indisponibilité des sommes: un blocage immédiat

La créance saisie devient immédiatement indisponible. Le tiers saisi ne peut plus payer le débiteur sous peine de devoir payer deux fois.

Le paiement: différé mais sécurisé

Le paiement n'intervient qu'à l'expiration du délai de contestation d'un mois. Le tiers saisi ne verse les fonds que sur présentation d'un certificat de non-contestation.

Une exception existe: le débiteur peut autoriser par écrit le paiement immédiat, ce qui lui évite le coût des intérêts pendant le délai de contestation.

Un contentieux encadré

Une contestation à délai limité

Toute contestation doit être formulée dans le mois suivant la dénonciation, par assignation devant le juge de l'exécution du domicile du débiteur.

L'auteur de la contestation doit simultanément:

  • Assigner le créancier saisissant
  • Dénoncer l'assignation à l'huissier de justice par LRAR
  • Informer le tiers saisi par lettre simple

Le rôle du juge de l'exécution

Saisi d'une contestation, le juge peut:

  • Donner effet à la saisie pour la fraction non contestée
  • Ordonner un paiement provisionnel
  • Prononcer la mainlevée
  • Condamner le tiers saisi défaillant

Sa décision est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours, sans effet suspensif.

Les situations particulières

La saisie-attribution et les procédures collectives

La jurisprudence a tranché un débat majeur: une saisie-attribution pratiquée avant l'ouverture d'une procédure collective reste pleinement efficace. L'arrêt de chambre mixte du 22 novembre 2002 (n° 99-13.935) a même jugé que cette règle s'applique aux créances à exécution successive (loyers, par exemple).

Attention aux délais de dénonciation quand une procédure collective survient:

  • La dénonciation doit être faite au liquidateur judiciaire et non au débiteur
  • Le délai de 8 jours n'est pas interrompu par l'ouverture de la procédure

Les comptes bancaires: règles spécifiques

La saisie d'un compte bancaire présente des particularités:

  • L'indisponibilité frappe l'ensemble des comptes
  • Le débiteur conserve automatiquement une somme à caractère alimentaire
  • La signification doit être faite où le compte est tenu

Attention: un compte joint doit faire l'objet d'une dénonciation à chaque cotitulaire (article R. 211-22).

Les créances à exécution successive

Pour les créances répétitives (loyers, pensions...), une seule saisie suffit pour appréhender les échéances futures. Les articles R. 211-14 à R. 211-17 du Code organisent le régime de ces saisies particulières.

Si vous êtes confronté à un débiteur récalcitrant malgré un titre exécutoire, ne tardez pas. La saisie-attribution constitue souvent la solution la plus efficace pour obtenir paiement, mais sa mise en œuvre technique requiert l'intervention d'un professionnel du droit. Les écueils procéduraux sont nombreux et peuvent compromettre définitivement vos chances de recouvrement.

Notre cabinet vous accompagne dans cette démarche en veillant à sécuriser chaque étape de la procédure. Pour évaluer la pertinence d'une saisie-attribution dans votre situation ou pour tout conseil stratégique de recouvrement, n'hésitez pas à prendre contact pour un premier entretien d'analyse.

Sources

  • Articles L. 111-1 et suivants, L. 211-1 à L. 211-5, R. 211-1 à R. 211-23 du Code des procédures civiles d'exécution
  • Cass. 2e civ., 19 sept. 2002, n° 00-22.086, JurisData n° 2002-015498
  • Cass. 2e civ., 28 juin 2006, n° 04-17.514, JurisData n° 2006-034256
  • Cass. ch. mixte, 22 nov. 2002, n° 99-13.935, JurisData n° 2002-016546
  • Cass. 2e civ., 12 oct. 2006, n° 05-10.850, JurisData n° 2006-035315
  • Cass. 2e civ., 2 déc. 2004, n° 02-20.622, JurisData n° 2004-025912
  • Cass. com., 13 févr. 1996, Banque et droit 1996, n° 569, p. 91, obs. Guillot
  • Cass. 2e civ., 16 déc. 2004, n° 03-13.117, JurisData n° 2004-026168
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