Que devient l'argent issu d'une vente sur saisie ? Comment s'assurer d'être payé quand on est créancier ? La distribution du prix constitue l'aboutissement des procédures d'exécution forcée. Cette phase technique mérite attention car elle détermine qui recevra quoi et dans quel ordre.
I. Mécanismes fondamentaux de la distribution du prix
La distribution du prix détermine comment répartir les sommes provenant de la vente forcée des biens d'un débiteur entre ses différents créanciers. Le Code des procédures civiles d'exécution prévoit deux régimes distincts selon la nature du bien saisi : immobilier ou mobilier.
Les créanciers ne sont pas tous logés à la même enseigne. Selon l'article L. 331-1 du Code des procédures civiles d'exécution, seuls certains peuvent participer à la distribution après saisie immobilière :
- Le créancier poursuivant
- Les créanciers inscrits sur l'immeuble à la date de publication du commandement
- Les créanciers inscrits avant la publication du titre de vente et ayant participé à la procédure
- Les créanciers privilégiés dispensés d'inscription
Cette liste restrictive montre l'importance d'agir tôt dans la procédure.
II. Distribution après saisie immobilière : deux voies possibles
A. Le cas du créancier unique : procédure accélérée
Quand un seul créancier remplit les conditions requises, la procédure est simplifiée. Il adresse sa demande de paiement directement au séquestre ou à la Caisse des dépôts et consignations dans les deux mois suivant la publication du titre de vente.
Cette demande n'est pas une simple lettre. L'article R. 332-1 du Code des procédures civiles d'exécution impose un formalisme rigoureux :
- Lettre recommandée avec avis de réception
- Demande motivée
- Joindre un état hypothécaire
- Fournir une copie exécutoire du jugement d'orientation
- Joindre le jugement d'adjudication ou le jugement constatant la fin d'instance avec copie du contrat de vente
- Produire un certificat du greffe attestant l'absence d'autres créanciers intervenants
Le paiement intervient dans le mois suivant cette demande. En cas de refus, le créancier peut saisir le juge de l'exécution.
B. Pluralité de créanciers : priorité à l'accord amiable
La situation se complique avec plusieurs créanciers. Le poursuivant doit alors :
- Notifier une demande d'actualisation des créances dans les deux mois suivant la publication du titre de vente
- Élaborer un projet de distribution dans un délai d'un mois après réception des créances actualisées
- Notifier ce projet aux créanciers et au débiteur
Le législateur privilégie clairement la voie amiable. Sans contestation dans les 15 jours, le projet est considéré comme accepté et soumis au juge pour homologation.
Une erreur de procédure à ce stade peut s'avérer coûteuse. Par exemple, la notification du projet doit mentionner, à peine de nullité, la possibilité de contestation et le délai pour l'exercer.
En cas de contestation, une réunion doit être organisée entre créanciers et débiteur. Un accord reste possible et sera constaté par procès-verbal auquel le juge confère force exécutoire.
C. Distribution judiciaire : quand l'amiable échoue
Sans accord, la distribution devient judiciaire. Le juge de l'exécution est saisi et établit l'état des répartitions. Cette phase peut inclure la désignation d'un expert pour ventiler le prix si plusieurs immeubles ont été vendus ensemble.
Le jugement établissant l'état des répartitions peut faire l'objet d'un appel, avec effet suspensif. Cette particularité, prévue à l'article R. 333-3 du Code des procédures civiles d'exécution, peut retarder considérablement le paiement final.
III. Distribution après saisie mobilière : règles spécifiques
La procédure diffère pour les biens mobiliers. Elle ne concerne pas toutes les saisies mobilières - la saisie-attribution et la saisie des rémunérations sont régies par d'autres règles.
Seuls les créanciers "saisissants ou opposants" participent à cette distribution. L'agent chargé de la vente propose un projet de répartition dans le mois suivant la vente, notifié par lettre recommandée avec avis de réception.
Sans contestation dans les 15 jours, le projet devient définitif. Sinon, une tentative de conciliation est organisée. En cas d'échec, le juge de l'exécution tranche.
Détail important : les créanciers ayant pratiqué une saisie conservatoire ne sont payés qu'après signification d'un acte de conversion. Cette subtilité technique justifie un accompagnement juridique pour sécuriser ses droits.
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Sources
- Code des procédures civiles d'exécution : articles L. 331-1 à L. 334-1 et R. 331-1 à R. 334-3 (distribution après saisie immobilière) ; articles R. 251-1 à R. 251-11 (distribution après saisies mobilières)
- Code civil : articles 2374, 1° bis et 2375 (créanciers privilégiés)
- JurisClasseur Roulois, Fasc. 2055 : Procédures d'exécution - Distribution du prix, 26 juin 2018
- JurisClasseur Procédure civile, Fasc. 1700-35 et 1700-65